journal intime
31 _ Vendredi 25 octobre 2002

Julie et sa mère

Eh bien voilà, nous avons accueilli Julie et sa mère Mireille ce soir et je dois dire que j'avais tort de me poser des questions au sujet de Julie car franchement c'est une fille adorable. Elle est sympa, gentille, mignonne, je ne vois vraiment pas comment je pourrais me prendre la tête avec une fille comme ça.
En tous cas je dois dire qu'elle a eu droit à une chambre magnifique. Eh oui ! Depuis mercredi soir j'ai passé tout mon temps à la retaper avec l'aide de ma mère, j'ai dû y passer quatorze heures dans la journée d'hier, mais je suis vraiment fière du résultat. Mercredi soir, comme je l'ai dit, on est allé acheter de la tapisserie et de la moquette et on a commencé le retapage après avoir viré tous les meubles de la pièce. Qu'est-ce qu'ils étaient laids, ces meubles ! Ils étaient vieux, moches, sales, sombres, et puis surtout chargés du souvenir de ma sœur et ça je ne pouvais plus le supporter. Alors tout est parti au garage, et à mon avis ils n'y resteront pas longtemps, bientôt ils iront dans une bonne grosse benne à ordures.
Jeudi matin je me suis levée aux premières heures (heureusement que c'est les vacances) et j'ai continué la tapisserie. Moi qui ne suis pas du tout manuelle, voire franchement maladroite avec mes deux mains, eh bien j'ai fait du bon travail je crois. A 11H00 tout était fait. Tout de suit ça change tout, une tapisserie claire et propre, par rapport à une autre sombre et sale. Tout de suite les choses sont plus lumineuses. Mais pas le temps de se reposer sur nos lauriers, on a tout de suite attaqué la moquette : dévissage des plinthes, découpage aux dimensions de la pièce, pose, et revissage des plinthes… parfait !
L'après-midi on est allé acheter les meubles. Ca a coûté un peu de sous mais il aurait bien fallu le faire tôt ou tard alors tant pis. C'est le voisin qui nous a emmenés au magasin, car il roule en fourgon, c'est beauf mais très pratique quand tu as du gros matos à trimballer. On a acheté un lit, un bureau, deux lampes, une armoire, des étagères, une petite table ronde, un beau fauteuil de bureau et une jolie petite chaise. Il a fallu faire deux voyages à cause du lit qui ne rentrait pas en entier dans le camion, mais le soir tout était là. On a même réussi à monter tous les meubles, il faut dire que le voisin nous a bien aidés, ça nous a pris jusqu'à minuit…
Ah oui j'oubliais, le seul truc qu'on a laissé dans la pièce c'est le vieux piano. Mais je l'ai repeint en beige, c'est plus gai, j'ai mis trois couches en tout, plus une couche de vernis pour qu'il brille et maintenant il est comme neuf.
Bien sûr la chambre peut sembler un peu vide, car il y a encore toute la déco à mettre, mais ça on ne peut pas le faire en quelques heures ou quelques jours. Ca se fera au fil des mois, Julie commencera si elle veut, et moi j'ajouterai des babioles au fil du temps. J'ai simplement accroché un poster avec des dauphins qui sautent à la surface des flots, comme ça on a vue sur la mer.
Bien ! Assez parlé de tous ces bricolages, passons aux choses sérieuses.
On a pris la voiture direction la gare à 18H00 pour les accueillir. Elles venaient de Paris dans un sale train corail, bonjour le voyage ! Dès que j'ai vu Julie (au fait elle a quinze ans, il faut peut-être le rappeler pour ceux qui ne suivent pas, assis au fond à côté du radiateur), je me suis dit que tout allait bien se passer. On s'est fait la bise pendant que nos mères rigolaient de se retrouver. Puis on est rentré parce que quand même, on n'a rien contre les gares mais on n'allait pas non plus rester plantées sur le quai toute la soirée. Surtout que le vendredi soir il y a toujours plein de monde.
En arrivant ma mère m'a dit de montrer sa chambre à Julie, ce que j'aurais fait de toutes manières sans qu'elle me le demande. Quand elle est entrée dans la pièce, Julie a posé (ou plutôt lâché) son sac par terre, elle a promené ses yeux tout autour avec un grand sourire et elle a dit " c'est chouette ici ! " C'est fou ce que ça m'a fait plaisir d'entendre ça ! Je ne lui ai pas dit que quarante-huit heures avant cette même pièce était triste à se pendre, ça n'aurait servi à rien, je lui ai juste dit que j'espérais qu'elle se sentirait comme chez elle. J'ai dit ça mais je ne sais même pas où c'est, chez elle. C'est vrai, je ne sais pas trop d'où elles viennent elle et sa mère, je connais simplement leur histoire dans les grandes lignes, c'est tout. Je crois savoir que ce n'était pas très gai, rien de plus.
Puis je me suis dit que moi j'aimerais bien rester un peu seule si je venais de faire un si long voyage, alors je lui ai montré la porte de ma chambre, je lui ai dit que si elle avait besoin de quoi que ce soit elle n'avait qu'à frapper, et voilà. Je lui ai sorti ma blague sur le poster des dauphins et la vue sur la mer mais apparemment elle a pas capté, mais bon c'est vrai qu'elle n'est pas très drôle, comme blague.
On a mangé ensemble ce soir, c'était très bien, ça m'a permis de mieux connaître Mireille sa mère. Elle n'a pas l'air très joyeuse, cette femme. Elle parle, elle rigole, mais on sent qu'il y a derrière tout ça une certaine angoisse qui est cachée, quelques souvenirs gênants qui lui interdisent toujours d'aller au bout de ses rires ou de ses gestes. Il faut dire qu'elle n'est pas dans une situation facile : elle n'a ni logement à elle, ni travail, et comme elle n'a aucun diplôme et qu'elle n'est quand même pas toute jeune, ça va être dur d'en trouver ! Mais je crois qu'on a peut-être un piston, mon père nous a laissé les coordonnées d'un type qui travaille dans l'armée, il paraît qu'il aurait peut-être quelque chose. Ce serait bien ! Quant à Julie elle va entrer au même lycée que moi (mais en seconde), et d'après ce que j'ai cru comprendre, elle a un peu peur d'arriver comme ça dans une classe en cours d'année, ce qui peut se comprendre. Il faudra que je la rassure sur ce sujet.
J'espère que quand Mireille cherchera un logement, elle évitera de prendre un appartement en HLM, en banlieue. La Rochelle ce n'est pas Chicago, loin de là, mais bon il y a quand même certains quartiers où il se passe des choses pas très marrantes, alors j'aimerais pas qu'elles se retrouvent là-bas…
Enfin… c'est les vacances et tout va bien. Je ne pense déjà presque plus à Alain, sauf quand je prends mes leçons de conduite, mais bon ce n'est plus lui qui me les donne alors ça va. A ce propos je passe l'examen pour la conduite accompagnée mercredi ! Je suis vraiment impatiente de régler cette affaire.

Voilà mon père partitexte précédent texte suivant A la pêche