J'étais
vraiment mal hier. Du matin jusqu'au soir j'étais
rongée par des préoccupations qui
m'ont empêchée de faire quoi que
ce soit, de sortir promener mon chien, de parler
librement à David, et même d'écrire.
J'avais pourtant prévu un texte pour hier
soir, et ce n'est pas faute d'avoir essayé.
Je me suis mise à mon clavier pour parler
de la dernière lettre de Julie, mais il
n'y avait pas moyen, je n'arrivais pas à
aligner trois mots.
En deux jours tout s'est chamboulé sur
mon site. Résumons la situation : un lecteur
connaît mon nom de famille, et mon cousin
lit mon journal intime depuis un mois. Deux chocs
presque coup sur coup.
Mardi je reçois un mail d'un lecteur qui
m'informe qu'il a découvert mon nom de
famille. Ici, sur ce site ! D'autres me l'avaient
déjà trouvé mais avec Google,
sur des sites où je m'étais inscrite.
Mais j'avais bien sûr laissé un faux
nom. Alors que là
Jusqu'à
mardi, il suffisait d'aller dans mon répertoire
" divers " et de suivre les liens, ajouter
une petite astuce et mon nom s'offrait aux yeux
En lisant ce mail j'ai reçu comme un choc.
Pendant deux ou trois minutes je suis restée
immobile, sans voix. Et puis bon, je me suis dit
qu'après tout ce n'était pas dramatique.
Mais quand même, ça fait drôle.
Et ce n'est rien à côté de
la suite, quand j'ai vu que mon cousin, qui partage
cet appartement avec moi, me lit tous les soirs.
Excusez-moi pour les détails techniques
qui vont suivre mais je suis obligée de
les mentionner. Le Net est envahi de logiciels
qui passent leurs journées à explorer
les sites. Par exemple les moteurs de recherche.
Ou bien les aspirateurs de pages, que sais-je
encore. Comme je suis nouvelle dans l'hébergement
payant, tous les jours je scrute mes fichiers
logs, dans lesquels sont listées toutes
les adresse IP des visiteurs de la journée.
Hors j'avais remarqué depuis quelques temps
de fréquentes visites d'un de ces logiciels,
du nom de Turnitin. Rien de grave, si ce n'est
qu'en trois jours il est venu 1500 fois sur mon
site. Faut quand même pas exagérer,
mon nombre de visites n'est pas illimité.
Si c'était Google je ne dirais pas non,
mais Turnitin tout le monde s'en fout. Alors j'ai
cherché le moyen de lui interdire l'accès
à mon site. J'ai interrogé certains
pros, on m'a expliqué qu'il fallait éditer
un fichier robots.txt, et que c'était une
méthode très courante, voire indispensable.
Je l'ai donc fait.
Hier, j'ai rouvert mon fichier log de mardi pour
vérifier l'efficacité de méthode.
Un fichier log, c'est entre onze et treize mille
lignes, quelque chose d'énorme, et chaque
ligne commence par l'IP du visiteur. Comme je
n'ai aucun logiciel d'analyse je fais ça
à l'il : connaissant l'IP du robot
de ce vilain Turnitin, j'ai parcouru les milliers
de ligne pour voir s'il s'y trouvait. Ca prend
une dizaine de minutes, car en général
ces lignes vont par bloc, avec des débuts
identiques. Aucune trace de Turnitin ou presque
: génial ! Mais là
j'ai vu
une IP qui ne m'était pas étrangère
: la mienne. Rien d'anormal, je visite souvent
mon site ;) Oui, mais là c'était
une visite de mardi soir, vers 23H30. Quelqu'un
a visité mon site sur mon ordi, mardi soir,
alors que j'étais chez David. J'ai ressenti
comme un choc. J'ai ouvert les logs des jours
précédents, et tous les jours, un
peu avant minuit, j'avais une vingtaine de lignes
commençant par mon IP. Je dois préciser
qu'ici on est à l'ADSL, connecté
24 heures sur 24 ou presque, avec la même
IP
Je me suis posée des millions de questions
durant tout l'après-midi. J'étais
incapable de faire quoi que ce soit : de sortir
me promener, de travailler, de lire, et encore
moins d'écrire. Et surtout j'hésitais
: attendre mon cousin pour lui poser carrément
la question, ou bien ne rien faire
Les heures
passaient et j'étais là, bêtement,
à attendre. En plus de ça, les propos
d'une certaine personne sur un certain forum,
sur lequel je participais justement pour me changer
les idées, m'ont blessée.
Il était huit heures passées et
j'attendais toujours. Pourtant David devait déjà
être chez lui. J'aurais pu aller le retrouver,
mais non, je voulais questionner mon cousin.
Vers huit heures et demi il est arrivé
et je lui ai demandé, comme ça,
direct, sans y aller par quatre chemins. J'ai
juste attendu qu'il soit assis pour ne pas l'agresser,
quand même
" Est ce que tu lis
mon journal intime ? " Il a hésité
un peu puis m'a dit " beh oui
"
Bon
Un peu après il a rajouté
" faut dire qu'il est pas très bien
caché ". Oui, c'est vrai. Je n'en
laisse aucune trace sur l'ordi, mais bon, rien
ne disparaît avec l'informatique. Je ne
sais pas comment il a fait, certainement par hasard,
mais voilà, il l'a fait. Alors je lui ai
demandé pourquoi il ne me l'avait pas dit
et il m'a répondu " parce que je trouve
ça génial et je voudrais pas que
tu t'arrêtes à cause de moi ".
Bon
Il a dit ça avec un petit sourire
amical qui m'a fait plaisir, dans le fond. Un
peu après il a développé
ses pensées (je déforme sans doute
un peu ses paroles) : " je le lis parce que
ça me fait tripper tout ça. C'est
terrible ton truc, c'est un peu triste, mais c'est
marrant aussi, et puis j'aime bien quand tu parles
de David. " Eh eh
C'est vrai que David,
j'ai dit des choses un peu extrêmes sur
lui, à commencer par mon texte de mardi,
la minute trente, tout ça
Voilà.
Aujourd'hui je suis soulagée. J'ai décidé
de poursuivre mon journal. Par contre je ne parlerai
plus jamais de mon cousin, ou alors je ne rentrerai
pas dans les détails. Et pour David, j'éviterai
de donner des détails aussi précis
que mardi. Peut-être que je vais perdre
en naturel. Peut-être que dans les jours
ou les semaines qui viennent, ce journal ne sera
plus vraiment intime, mais plus axé sur
des faits objectifs. Il va falloir que je m'habitue
au regard de mon cousin.
Mais ce qui me soulage, c'est que je n'aurai plus
rien à cacher. Je pourrai écrire
sans attendre qu'il soit ailleurs, devant lui
si je le veux, je pourrai plonger dans mes mails
sans qu'il me pose la question : " mais t'as
plein d'amis ! ! " Et puis il m'aidera sans
doute à mettre en place certaines techniques,
car il est plutôt calé en informatique.
On en a beaucoup reparlé, mais je viens
de raconter l'essentiel.
Voilà
désolée pour
le texte insipide et très technique que
je viens de raconter. J'essaierai d'écrire
demain mais ce n'est pas certain. Excusez-moi
également de ne pas répondre à
mes mails dans les jours qui viennent, j'espère
que vous comprendrez
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