journal intime
148 _ mercredi 30 avril 2003

Feuille blanche

Je ne sais pas si ça se sent, mais depuis lundi j'ai beaucoup de mal à écrire. Peut-être que du coup, mes textes sont plus monotones et plus longuets... Mais je m'y attendais, je le savais que la reprise serait dure. Avec ces jolies journées passées avec Julie, que je prenais soin de raconter quotidiennement, j'ai placé la barre trop haut. Si je ne devais garder qu'une seule partie de mon journal, ce serait celle-là. Jamais je n'ai été aussi honnête. Et ça aussi je m'y attendais...
Dès que j'ai su que Julie viendrait passer une semaine ici, quelque chose me disait que mon journal, à ce moment-là, serait dix fois plus beau que tout ce que j'avais écrit auparavant. Et je ne me suis pas trompée. Je me rappelle, je me mettais à mon clavier et les mots sortaient tout seuls, au bout d'une demi heure je n'avais plus qu'à l'envoyer. Alors que là, aligner les phrases me prend un temps fou. Quelquefois, je n'écris pas directement au clavier, mais d'abord au stylo, sur une feuille. Ca permet de varier un peu, ensuite je n'ai plus qu'à recopier. Ce matin j'ai essayé, mais c'est comme si le stylo me tombait tout seul des mains. Comme si à chaque mot, j'imaginais le regard de Julie dessus, et que sans ce regard je n'arrivais plus à avancer. C'est stupide, vu qu'elle ne m'a jamais lue. Mais c'est ainsi... Maintenant que le train-train a repris et que je passe une bonne partie de mes journées toute seule, à travailler ou à me promener, eh bien j'ai l'impression que tout est gris et fade autour de moi. Il n'y a rien à en tirer. Et pourtant, rien n'a changé, la vie continue. Les journées se rallongent un peu, tout doucement...
Pourtant on aura tout essayé pour qu'elle reste. Elle me disait que son année scolaire était fichue, que ses notes étaient en binaire : que des 0 et des 1. Alors perdue pour perdue, lui disais-je, autant que tu restes ici. Hélas ce n'est pas la personne concernée qui choisit. Ses parents n'ont pas voulu. Sa mère aurait peut-être fini par fléchir, mais pas l'autre naze. N'en parlons plus. Et puis je suis loin d'être malheureuse, je suis bien entourée ici, c'est pas comme si j'étais seule... Je sens que demain, David va m'offrir un joli cadeau pour mon anniversaire. Je me demande bien quoi, par contre. En ce moment il est au foot, moi je tourne les pouces, et surtout je me tourne les méninges pour ne pas rendre feuille blanche à mon journal. Mais je sens que je ne vais pas lutter longtemps. D'ailleurs j'arrête, parler pour ne rien dire ne sert à rien. Allez, demain j'ai dix-huit ans, c'est la fête, youpi.

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