Pour mon premier
texte, je pourrais commencer par parler de moi
: qui je suis, ce que je fais, etc
Pourtant,
je trouve qu'il y plus intéressant que
moi à mes yeux : il y a ma ville, La Rochelle.
Ce n'est pas forcément la plus belle du
monde mais c'est celle où je suis née
et où je vis depuis dix-sept ans alors
pour moi oui, c'est une des plus belles.
C'est la balade que j'ai faite ce matin qui m'a
donné envie d'en parler. Comme je savais
que j'allais en causer sur le site j'ai été
particulièrement attentive à tout
ce que je voyais, plus que d'habitude. Ce matin
je devais me rendre au marché me faire
payer trente euros qu'on me devait encore car
j'y ai travaillé cet été.
Ce n'était pas un boulot désagréable,
en plus ce n'était que deux matinées
par semaine, je devais mettre des poissons dans
du papier, et ce matin je devais aller voir Mme
C. pour qu'elle me donne la fin de ma paye.
Pour les incultes en géographie ou les
non-français, La Rochelle est l'une des
principales villes des Charentes, située
sur la côte atlantique, à l'ouest
donc, sur l'océan. Ni au nord ni au sud
: si vous prenez une carte de France et que vous
tirez un trait au milieu, de la gauche vers la
droite, vous aurez La Rochelle à l'extrémité
gauche du trait
c'est clair non ?
Là où j'habite j'ai une rue à
descendre et je suis sur l'avenue Jean Guiton,
au niveau du Sacré-Cur. Après
j'arrive au parc. La ville est traversée
de long en large par un parc bien entretenu, trop
bien entretenu même, avec de l'eau qui coule
et des canards que j'ai toujours connus. Quand
j'étais petite je venais là tous
les soirs, à l'époque il y avait
plein d'animaux, des paons, des chèvres,
et d'autres, aujourd'hui il y en a encore mais
moins j'ai l'impression, ils ont dû supprimer
quelques enclos. Par la suite c'est là
que je venais promener mon chien, jusqu'à
ce qu'un responsable me fasse remarquer à
plusieurs reprises que mon berger-allemand risquait
d'abîmer les pelouses et de faire peur aux
enfants, ce qui était pourtant complètement
faux.
Après le parc, on entre dans la ville proprement
dite, avec des bâtiments plus vieux et plus
jolis. Au numéro 35 il y a une espèce
de grosse barraque qui a dû être jadis
magnifique et qui aujourd'hui est toute noire
de suie ou de je ne sais quoi, avec les volets
gris-jaunes. Je me suis toujours demandée
ce qu'on pouvait bien y faire dans ce petit manoir,
je doute qu'il soit habité par une famille,
je n'en sais rien.
Et puis on arrive dans la vielle ville, la vraie
Rochelle, dans le port, le " vieux port "
comme on dit puisqu'il y a également ici
un port de commerce et un autre de plaisance.
Je ne sais pas si j'aime les bateaux parce que
j'aime cette ville ou si j'aime cette ville parce
que j'aime les bateaux, toujours est-il que c'est
toujours un plaisir pour moi que d'aller me promener
par exemple du côté de La Palice,
le port de commerce. C'est là que sont
les vrais gros bateaux, ceux qui font le tour
du monde, les gros cargos crasseux qui ont l'air
de naviguer depuis des éternités.
Aujourd'hui, l'accès à ce port est
devenu interdit au public mais heureusement un
ami de la famille travaille là-bas et grâce
à lui je peux aller régulièrement
voir les bateaux, mais aussi quelquefois les visiter,
assister au déchargement des marchandises,
voir les marins
C'est beaucoup mieux que
le port de plaisance où sont entassés
les voiliers tout blancs tout propres des riches
de la ville ou d'ailleurs : je n'aime pas du tout
cette manière de naviguer et beaucoup d'entre
eux ne se sont jamais vraiment éloignés
des côtes françaises
c'est nul.
Ce matin c'est donc au vieux port que j'étais,
celui à partir duquel tout a commencé
je suppose. Parfois j'essaie de l'imaginer tel
qu'il était il y a cinquante ans, cent
ans, quatre-cents ans
Cinquante ans en arrière
j'arrive à imaginer grâce à
ce que m'en a raconté mon grand père.
Cent ans c'est déjà plus dur, et
quatre cents ans
Là c'était
la grande époque de La Rochelle, qui était
l'une des principales villes françaises
et la capitale nationale du protestantisme, à
l'époque où les conflits de religion
faisaient rage dans le pays. J'ai bien retenu
ce qu'on m'a appris à ce sujet : le roi
Louis XIII et Richelieu ont assiégé
la ville pendant plus d'un an en 1628. Les rochelais
ont tenu quinze mois avant de se rendre, ayant
perdu l'espoir d'être aidés par les
anglais pourtant sur place. Le maire de la ville,
l'un des héros de la cité, c'était
Jean Guiton, qui a donné son nom à
l'avenue dont j'ai parlé tout à
l'heure. Après quinze mois les rochelais
se sont rendus : 22 000 habitants sur 27 000 étaient
morts de faim, après avoir mangé
du rat, de l'herbe, et de la chair humaine. Ca
me fait drôle de penser que ça s'est
passé ici même, à l'endroit
où je vis en ce moment
Mais je parle je parle et je m'éloigne
de mon sujet.
J'arrive au vieux port donc. A gauche la grosse
horloge qui est l'un des symboles de la ville.
En face il y a les deux fameuses tours, la tour
St Nicolas et la tour de la chaîne, qui
sont elles aussi deux symboles de la ville, comme
l'horloge, et qu'on appelle les " filles
de La Rochelle ". La plus petite doit son
nom au fait qu'autrefois ils mettaient une grosse
chaîne pour barrer l'entrée du port.
La chaîne en question est toujours là,
à côté, et c'est clair que
ce n'est pas une chaîne de minus, elle est
énorme.
Les bateux du vieux port sont de tous types, il
y en a des jolis et des moins jolis, mais bon
dans l'ensemble ce n'est pas trop mon genre. Il
y a ici la statue d'André Duperré,
un autre personnage marquant de la ville. Je me
suis arrêtée pour lire la plaque
sous la statue : c'est bête ça fait
dix-sept ans que je passe devant et je ne l'avais
encore jamais lue. Et ce qui est encore plus bête
c'est que je l'ai lue ce matin et que j'ai déjà
oublié ce qu'il y avait d'écrit
Je
me rappelle juste que c'était un gosse
d'une famille rochelaise de vingt-deux enfants
(rien que ça !), qui avait été
marin, grand amiral sous Napoléon et après,
et qui avait fini ministre de la marine. Une famille
de vingt-deux enfants, ça laisse pensif
quand même
Je longe l'eau et j'emboîte le pas à
la rue du port qui, comme son nom l'indique, commence
au port. Là c'est les petites ruelles pavées
et ombragées. Le flot énorme des
vacanciers de l'été s'est dissipé,
on peut y marcher tranquillement désormais.
Finis les restos de fruits de mer qui étendent
leur terrasse jusqu'au milieu de la rue déjà
pas très large. Encore une rue et j'arrive
sur la place de l'hôtel de ville, la plus
belle de la ville, avec la poste dans un large
et vieux bâtiment, et surtout la mairie,
un très vieux bâtiment qui date probablement
de l'époque dont je parlais tout à
l'heure, Richelieu, Louis XIII, les protestants,
etc
Ca aussi c'est un symbole de la ville.
Au milieu de la place trône Jean Guiton,
encore lui, décidément c'est bien
le number one de la ville.
J'emprunte une autre rue et quelques minutes après
me voilà enfin au marché. Si j'osais
je dirais bien que lui aussi c'est un symbole,
mais on va finir par croire qu'il n'y a que des
symboles ici alors je le dirai pas. Le bâtiment
du marché, si je devais le décrire,
je dirais que c'est une espèce de très
gros manège carré, coloré
et léger mais solide quand même.
Ici on y vend surtout des poissons, des crabes,
des crevettes et autres écrevisses.
Comme je suis arrivée sur la fermeture,
j'y ai été accueillie par un tapis
de feuilles de salades. Je suis allée retrouver
Mme C. qui m'a donné mes trente euros en
me remerciant, que je lui avais rendu un grand
service, mais non que c'était moi etc etc
Voilà ce que j'ai vu de La Rochelle ce
matin, il y aurait bien d'autres choses à
dire, une infinité, j'en aurai sûrement
l'occasion plus tard. Il paraît que quand
on raconte quelque chose il faut commencer par
planter le décor : c'est fait, j'ai décrit
ma ville.
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