Hier je suis donc
allée chez Marine, cette fille rencontrée
à la soirée de mardi. Elle m'avait
dit qu'elle avait un labrador, je m'attendais
donc à trouver
un labrador. Je veux
dire un vrai, un gros. En fait c'était
un chiot, il a un mois, bon, c'est un labrador
quand même mais il ne fera pas copain avec
mon chien à moi.
Il m'a quand même fallu un petit bout de
temps avant de les trouver, Marine et son chien.
D'abord il a fallu que je me rende chez elle :
quarante minutes à pied. J'aurais pu ne
mettre qu'une demi-heure mais je me suis perdue,
j'avais refusé de prendre un plan de quartier
avec moi malgré les conseils de mon cousin,
encore une fois je n'en ai fait qu'à ma
tête
En plus les numéros de
maison n'étaient pas écrits sur
les façades, il a fallu que je les compte
à la main. Elle m'avait précisé
qu'elle vivait au-dessus d'un commerce de vêtements.
Je m'attendais donc à voir
un commerce
de vêtements. En fait c'était un
entrepôt avec une bonne quinzaine de travailleurs.
Et cet entrepôt se trouvait de part et d'autre
d'une arrière-cour pas très large
mais très longue, une sorte de petite impasse
au milieu des bâtiments
Il n'y avait
pas un chat mais je voyais quelques types derrière
les vitres, puis j'ai trouvé une pièce
qui ressemblait à un accueil, avec de la
moquette, un bureau et un homme en costar derrière
ce bureau. Marine m'avait dit de m'adresser au
chef, je suis donc entrée. Il m'a dévisagé
étonné, avec mon chien je faisais
en effet une cliente bien inhabituelle
"
Bonjour, je voudrais voir Marine s'il vous plaît
". Il me fait " ah ! " rassuré
apparemment, puis " la fille de Michel ?
" Ben j'en sais rien moi, de qui elle est
la fille. Pis c'est pas son père que je
veux voir, c'est elle, éventuellement son
labrador mais pas son père. Alors j'ai
dit " peut-être ". Il m'a alors
conseillé d'aller directement m'adresser
au Michel en question, qui devait se trouver dans
le local en face. Je traverse donc l'arrière
cour et me voilà dans l'entrepôt
proprement dit, face à face avec un petit
portugais. Ce n'est pas péjoratif quand
je dis " petit portugais ", il était
petit et portugais, c'est tout. Il n'était
pas le seul dans la pièce mais c'était
lui le plus proche et il avait l'air de se tourner
les pouces alors c'est à lui que je me
suis adressée : " Bonjour je voudrais
voir Michel, le père de Marine ".
Aïe ! Apparemment la question que je lui
posais était trrrrès difficile car
il a dû réfléchir pendant
vingt secondes au moins avant de trouver une solution
: reposer ma question à son collègue
qui était au fond du local. " Il est
où le chef ? " L'autre a marmonné
un truc que je n'ai pas compris et je n'ai pas
pu en savoir d'avantage. Heureusement peu après,
son collègue est parti en disant qu'il
allait chercher le Michel en question. Me voilà
donc à patienter avec le petit portugais
qui me demande " alors t'es une amie de Marine
? " Eh oui
Alors il poursuit "
Ah y a pas mal de monde qui vient la voir, mais
c'est des garçons là c'est une fille
ça change. T'es à la fac avec elle
? " Alors je lui ai expliqué que non,
que j'étais lycéenne à La
Rochelle mais que je venais de laisser tomber
ma ville et mon lycée pour Paris et les
cours par correspondance. Erreur, j'aurais mieux
fait de me taire ! Il a eu l'air extrêmement
déçu par ce que je lui apprenais,
il me disait " Ah la la la la
. Y faut
pas quitter les études ! Ah la la
moi j'ai deux filles, je leur dit " faites
une formation après vous verrez, au moins
vous pourrez avoir un bon métier pas comme
moi " c'est ça la vie, y faut travailler
tant qu'on est jeune ", et patati et patata,
il commençait à me gonfler sérieusement.
J'avais envie de lui dire " non mais de quoi
je me mêle ? Occupe-toi de tes oignons ou
fous moi la paix ! " Mais je suis polie alors
je l'écoutais sans répondre. Et
enfin, Marine est arrivée.
On est monté dans son appartement où
elle vit avec ses parents, au-dessus de l'entrepôt
dont son père est le chef. Un vrai dédale,
cet entrepôt, d'ailleurs. Une bonne vingtaine
de salles minuscules, reliées par des petits
couloirs ou escaliers. Et enfin, nous voilà
tranquilles, en haut.
Marine est étudiante (mais quand même
gentille) à la même fac que mon cousin,
c'est d'ailleurs de là qu'ils se connaissent.
En montant chez elle, à travers le labyrinthe
de petites salles, d'escaliers et de couloirs,
elle me racontait un peu ce qui se passait ici,
les vêtements, les travailleurs, tout ça
Dans l'une des salles que nous avons traversées,
deux de ces travailleurs, portugais eux aussi
d'ailleurs, se couraient l'un après l'autre
et ça n'avait pas l'air d'être pour
rire, j'ai vraiment cru qu'ils allaient se taper
dessus. Marine m'a juste dit " fais pas attention
", et je les ai vus disparaître derrière
un rayon de vêtements. J'espère quand
même qu'ils ne se sont pas fait trop mal.
J'étais tout juste dans sa chambre qu'une
dispute éclatait déjà. Mais
non ! Pas entre elle et moi, entre son chien et
le mien ! Ca c'est sûr, mon Adonis il n'aime
pas bien les chiots. Tout petits comme ça,
il sait d'avance que je vais craquer et m'amuser
avec et ça le rend jaloux. Tant pis ! Effectivement
on a bien joué avec le petit labrador,
c'est vraiment mignon à cet âge-là.
Et mon chien n'était pas content, il montrait
les crocs aux petits qui était apeuré,
alors je lui ai dit d'aller au coin. D'ailleurs
ça a beaucoup étonné Marine
que mon chien m'obéisse comme ça
et qu'il aille s'asseoir dans le coin sur simple
demande de ma part. Ben attends qu'est ce que
tu crois, il est éduqué mon chien
! Je lui parlé de ce que j'ai déjà
raconté dans ce journal, sur tout ce que
je lui avais appris à faire dès
les premières semaines de sa vie. En plus
de ça, je dois dire que c'était
un chiot de l'armée, mon père l'avait
récupéré là-bas, ses
deux parents étaient chiens militaires
: il a des gênes. Marine a essayé
elle aussi de faire aller son chien au coin mais
ça ne marchait pas. Et puis je lui ai dit
que ça ne servait à rien de lui
demander ça sans raison, il faudra qu'elle
lui demande quand il fera une bêtise. Enfin
bref.
Bonne surprise : il y avait dans la chambre de
Marine un poster de Jim Morrisson. En venant à
Paris, j'ai pris avec moi une quinzaine de disques,
j'aurais aimé en apporter beaucoup plus
mais on ne peut pas tout mettre dans un sac. Mais
dans cette petite sélection il y avait
bien sûr Les Doors, elle adore elle aussi,
c'est incroyable comme ce groupe continue d'avoir
des admirateurs, si longtemps après la
mort de son chanteur ! D'ailleurs on en a parlé
de son chanteur, Jim, et je lui ai dit que j'aimerais
bien aller voir sa tombe au Père Lachaise.
Elle m'a donc proposé d'y faire un saut,
pas hier mais aujourd'hui. Ce sera donc pour mon
récit de demain.
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